OMOSA Rencontre: Martin Charrouset, Directeur du eCommerce chez Sodastream France

Auteur
Axel Corton
Sujet
Non classé
Date
18 septembre 2025
Temps de lecture
~ 5min
Résumé de l'article
Intro
Comprendre avant d’agir: naviguer dans une organisation complexe
Bâtir sa propre boussole: Excel avant la Business Intelligence
Comprendre vite, agir juste
Des priorités guidées par l’impact business
Conversion: une checklist de contrôle testée et validée
Sur le site: ce qui fait vraiment la différence
Une stack technique volontairement minimale
Repenser plutôt que bricoler
Tester, échouer, apprendre
Une vision terrain du eCommerce
Conclusion
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Intro

Comment prendre la direction d’une division eCommerce au sein d’une organisation internationale complexe, avec des processus imbriqués, de multiples outils et des attentes business immédiates ?
Martin Charousset, aujourd’hui Digital Manager chez SodaStream France, partage une approche très concrète de la prise de poste dans un tel contexte.
Anciennement chez Faguo, fort de plusieurs années d’expérience en pilotage eCommerce, il apporte un état d’esprit orienté court terme et impact, ainsi qu’une rare capacité à faire avancer les choses, même au sein de grandes organisations parfois rigides.
Une plongée franche et opérationnelle pour les professionnels eCommerce confirmés, désireux de se benchmarker, d’apprendre et d’affûter leurs propres méthodes.

Comprendre avant d’agir: naviguer dans une organisation complexe

Rejoindre SodaStream, c’est intégrer une structure mondiale où chaque pays pilote son propre eCommerce, tout en s’appuyant sur des hubs décentralisés. Martin supervise la France, mais les équipes tech sont en Israël, les données sont centralisées en Australie, et les processus sont innombrables.

« Rien que comprendre qui fait quoi et où trouver l’information m’a pris plusieurs semaines. »

Parmi ses premières priorités: cartographier les parties prenantes, comprendre les workflows et identifier les silos. Par exemple, le chiffre d’affaires eCommerce est suivi dans Shopify, tandis que le reporting corporate repose sur les expéditions, dans un outil interne spécifique. Résultat: des écarts constants et un système de suivi de performance compliqué.

Bâtir sa propre boussole: Excel avant la Business Intelligence

Martin évite d’utiliser Looker Studio:

« Trop lent, pas à jour, et je ne pouvais pas faire confiance à la façon dont c’était paramétré. »

À la place, il a construit un tableau de bord sur Google Sheets, comme il l’avait déjà fait chez Faguo. Chaque mois, il y suit: le chiffre d’affaires, le nombre de commandes, le taux de conversion, le panier moyen, le nombre d’articles par commande, le trafic, le ROAS et le budget publicitaire.

« C’était une manière de remettre les choses dans des cases familières. Quand on arrive dans un nouvel environnement, on a besoin de repères. »

En analysant ces KPI mois par mois, il a identifié un signal d’alerte: malgré l’augmentation du budget publicitaire, le trafic chutait fortement (entre –20 % et –60 %). Un signe clair que l’acquisition nécessitait une sérieuse attention.

Comprendre vite, agir juste

Le diagnostic était clair: les taux de conversion augmentaient, le panier moyen progressait, mais le trafic s’effondrait. Pendant ce temps, le budget marketing avait augmenté. En remontant la chaîne, Martin s’est rendu compte que les campagnes Meta Ads ne généraient que 10 % du trafic, alors qu’un site DTC devrait en capter entre 20 et 50 %. Pire encore: chaque session coûtait 4 €, avec un CTR très faible.

« C’est alarmant. »

Il a fait appel à des experts externes, dont l’agence OMOSA, pour auditer la stratégie Meta. Ensemble, ils ont identifié des campagnes sous-performantes, des problèmes de tracking et un écart majeur entre le back-office Meta et GA4. En quelques mois, ils ont réussi à faire passer le coût par session de 4 € à 0,80 €.

Des priorités guidées par l’impact business

« Je ne suis pas là pour lancer une refonte dans deux ans. J’ai besoin de chiffre d’affaires maintenant. »

Martin construit sa feuille de route dans Excel, en attribuant un score approximatif (de 0 à 3) à chaque projet selon l’impact estimé sur le revenu.

Un exemple: la réactivation de Bing Ads, arrêtée suite à un problème de facturation. Après avoir réglé l’incident, la plateforme a été relancée et, en avril, les résultats sont tombés:

3 000 € dépensés → 15 000 € de chiffre d’affaires → ROAS x5.

Pas une révolution, mais du concret. Une manière intelligente de regagner des parts de marché.

Conversion: une checklist de contrôle testée et validée

Quand le taux de conversion chute, Martin se tourne vers sa checklist de référence. Première étape: changements dans les sources de trafic ? Promotions passées ? Déploiements récents ou mises à jour du container GTM ? Problèmes de vitesse du site ? Ruptures de stock ? Il analyse également la répartition par appareil, navigateur et système d’exploitation, ainsi que les étapes du tunnel où les abandons se produisent.

« Parfois, on passe tout en revue et on ne trouve toujours pas le problème. Il faut juste accepter que certains mois soient mauvais. »

Sur le site: ce qui fait vraiment la différence

Chez Faguo, Martin a testé une application de merchandising dynamique qui réorganise les grilles de produits en fonction de leurs performances, mises à jour chaque heure. Il partage également quelques gains rapides:

  • Afficher Klarna en haut des pages produits

  • Utiliser des images lifestyle ou « portées » comme visuel principal

  • Mettre en avant les avis clients de manière visible

Il a également testé des landing pages plus engageantes, comme « Top 5 des raisons d’acheter une SodaStream », qui ont bien fonctionné, mais difficiles à scaler sans ressources créatives adéquates.

Une stack technique volontairement minimale

Martin se limite à GA4, GTM, Shopify et Google Sheets. Des données simples mais fiables valent mieux qu’un joli tableau de bord.

L’essentiel, ce sont des indicateurs exploitables qui aident réellement à piloter le business.

Repenser plutôt que bricoler

Le site actuel, selon Martin, est trop dépassé. Il plaide pour une refonte complète, et non pour un simple ravalement de façade. Il veut reconstruire sur des bases solides, capables de répondre aux attentes des clients d’aujourd’hui (par exemple, en ajoutant une fonction de recherche). Pour lui, cette « dette produit » représente en réalité une opportunité de générer rapidement de la valeur.

Tester, échouer, apprendre

Quelques-uns de ses tests les plus révélateurs:

  • Google Pay: testé, mais trop peu d’utilisateurs pour justifier l’implémentation.

  • Avis produits: initialement contestés en interne, ils se sont révélés un vrai levier de conversion.

  • Pages de destination pour les best-sellers vs pages de catégorie: les landing pages sélectionnées l’emportent.

  • Test des images principales: les visuels lifestyle ont systématiquement surpassé les packshots (chez Faguo).

Une vision terrain du eCommerce

« L’eCommerce n’a rien de magique. C’est de l’acquisition, de la conversion, de la fidélisation. Si votre produit est bon et que votre stratégie est claire, ça fonctionne. »

Martin adopte une approche pratique et artisanale de l’eCommerce. Il se concentre sur les fondamentaux, priorise de manière claire et sait quels leviers actionner. Dans des organisations imparfaites, c’est ce qui permet d’obtenir de vrais résultats.

Conclusion

Martin Charousset possède une capacité rare à avancer dans l’incertitude. Il définit ses propres KPI, identifie les données fiables, traite les problèmes selon leur urgence et agit rapidement. Sa vision de l’eCommerce privilégie l’agilité aux grandes stratégies, Excel aux tableaux de bord Looker, et la clarté opérationnelle à la surcharge d’outils.

Une lecture indispensable pour quiconque pilote la performance eCommerce dans des environnements imparfaits.